Quand j’ai lancé mon activité en 2020, j’étais concentré sur une chose : la rentabilité de mon entreprise ! J’étais très orientée vers le fait de consacrer mon temps et mon énergie à la pérennisation de ma boîte. Les autres questionnements étaient secondaires et mon cœur d’activité étant à mes yeux vertueux par essence, je ne ressentais pas le besoin d’aller plus loin.
Un échange avec une structure associative militante en 2022 était venue bousculer mes certitudes. Cette discussion m’avait poussée à coucher sur le papier ce que j’entendais pas « être une entreprise féministe ». Depuis, je me suis attachée à mettre en application mes lignes guides. Avec cet article, je voulais donner un coup d’œil dans le rétro et poursuivre mes réflexions pour (devenir ?) être une entreprise (encore plus) engagée.
Mon bilan d’entreprise féministe
Je m’étais fixé 6 axes de travail : inventer mes propres codes de la réussite, promouvoir la sororité, être consciente d’où je parle, réagir face au sexisme, promouvoir des projets militants et utiliser une communication fondée sur le langage inclusif.
Le premier axe est celui qui me donne le plus de fil à retordre. Ma comptable, ma famille me ramène souvent à une dimension financière pour juger de la réussite de mon projet. Pourtant je n’ai pas envie de tomber dans une course au record de chiffre d’affaire chaque année. J’ai vécu en 2022 des périodes de grande tension, parfois au détriment de ma santé. Je tâche d’en tirer les leçons pour trouver le juste équilibre entre la viabilité de mon activité et la préservation d’espaces temps suffisants pour faire et voir autre chose.
La sororité devient une incontournable. Mais je dois reconnaître que parfois le reflexe de concurrence est tenace quand je suis dans une période de doute !
Je continue à travailler chaque jour sur mes représentations, sur mes blocages, sur mon vécu. Cela m’aide à mieux me connaître et être plus lucide sur mes privilèges et l’endroit d’où je parle.

Réagir au sexisme est aussi devenu un réflexe. Par contre, je ne garantis pas que ma méthode de réaction soit toujours la bonne. J’ai beau connaître et préconiser différentes méthodes, parfois j’ai du mal à les appliquer moi-même. ça m’aide d’ailleurs à rassurer les personnes que je sensibilise sur le fait de « faire de son mieux » !
La communication inclusive fait elle aussi partie de mes habitudes. Je la défends fermement chaque fois que j’en ai l’occasion.
Enfin, comme je m’y étais engagée, j’ai pu verser l’équivalent de 2% de mon chiffre d’affaire à des associations et projets militants en faveur des droits des femmes et de l’égalité. J’ai ainsi pu soutenir la Fondation des femmes, Solidarités femmes, l’Association Nantaise de Rugby Féminin, la caisse de grève lors du conflit social sur les retraites, etc. J’ai aussi eu le plaisir d’apporter mon soutien à un évènement féministe à Nantes (les 30 ans de l’espace Simone de Beauvoir)
Mes engagements complémentaires sur le volet social
Au-delà de dons en argent, j’ai opté également pour le don de temps bénévole auprès de jeunes via la plateforme My Job Glasses. Les étudiant·es peuvent me contacter pour échanger sur mon parcours et leurs perspectives. Nos échanges sont l’occasion de partager des conseils et retours d’expérience afin de faire gagner du temps aux étudiant·es et de les aider à s’orienter.
Je donne également du temps bénévole dans le cadre d’actions avec la Fondation Agir Contre l’Exclusion 85 et FACE 44 avec qui je passe 1 journée chaque année là encore pour accompagner des jeunes filles et garçons dans leur projet d’insertion professionnelle (job dating en 2022, action stage de 3ème sur le thème de la mixité des métiers dans un collège de Loire-Atlantique en 2023).
Etre une entreprise éco-responsable ?
Etre une entreprise féministe ne veut pas dire que je suis exemplaire sur les autres dimensions de mon activité. J’ai donc aussi commencé à réfléchir sur le volet environnemental (mode de déplacement, consommation). Être engagée sur le plan social c’est bien mais l’être sur le plan environnemental également, c’est encore mieux.
Mobilité et production de déchets
Sur la mobilité, je dois encore progresser. Je réalise la quasi totalité de mes déplacements en train et/ou en transports en commun (tram, métro, bus selon les villes) mais pour certains déplacements à moins de 1h30 de mon domicile, la voiture et la flexibilité des horaires qu’elle offre reste encore attractive.
Je commence par ailleurs à réfléchir à ma consommation lorsque je suis en déplacement. J’avoue être une adepte du combo boisson + sucrerie à emporter achetés à la gare. C’est une sorte de petit rituel plaisir quand je suis en déplacement. Mais évidemment ce n’est pas idéal au niveau production de déchet (gobelet caton ou bouteille plastique + papier d’emballage de la sucrerie + souvent 5 serviettes en papier). J’essaye désormais de voyager avec ma gourde ou bien quand la tentation est trop grande (et que ma correspondance le permet) de prendre un café « sur place », servi dans de la vaisselle réutilisable.
Dilemmes
Mais c’est sur un autre plan que mon engagement en matière environnementale est le plus malmené. En effet, c’est un vrai dilemme quand je suis sollicitée par des entreprises pas toujours exemplaires sur le plan environnemental, qui me demandent une intervention sur la lutte contre le sexisme au travail ou une action de promotion de mixité. Dois-je refuser de collaborer avec des entreprises peu investies dans la protection de l’environnement voire des entreprises dont l’activité ne permet pas de rester sur la trajectoire climat de l’accord de Paris (+1,5°) ? En faisant cela, je perdrais aussi la possibilité de contribuer à l’amélioration des conditions de travail des salarié·es ce qui est dommageable. Bref, c’est un vrai casse-tête pour moi.
Etre une entreprise labellisée ?
Toutes ces réflexions me conduisent aujourd’hui à envisager d’aller plus loin. J’envisage de faire reconnaitre mon engagement par le biais d’un label. Reste à définir lequel (B Corp ? Entreprise à mission ?) ! Ceci me permettra de renforcer ma démarche et pourquoi pas d’intégrer une communauté d’entreprises engagées elles aussi et avec qui partager mes questionnements, mes contradictions et surtout des solutions !
Vous vous posez les mêmes questions ? Discutons-en !
Aurélie ARQUIER